Titre

L'expérience éthique du spectateur contemporain

Auteur Aurélien MAIGNANT
Directeur /trice Prof. Marc Escola
Co-directeur(s) /trice(s) Prof. Françoise Lavocat
Résumé de la thèse

À l’issue du spectacle Please continue (Hamlet), le metteur en scène Yan Duyvendak demandait à ses spectateurs de juger le célèbre meurtrier de Shakespeare : « la moitié des gens tirés au hasard comme jurés a acquitté Hamlet, l’autre moitié l’a condamnée pour une période allant d’un à dix ans de prison » (2014b : 4). La pièce attire notre attention sur la divergence des expériences éthiques vécues par les spectateurs de théâtre et sur la pluralité des évaluations morales d’une même fiction. La recherche actuelle étudie la lecture comme une expérience éthique capable de modifier nos croyances morales, mais aucun chercheur en études théâtrales ne s’est emparé du sujet et il n’existe pas d’étude empirique sur la construction de l’évaluation morale du spectateur. Le présent projet veut remédier à ce manque en étudiant comment le spectateur contemporain met en discours l’expérience éthique vécue au théâtre, expérience à partir de laquelle il produit une évaluation morale du spectacle. Spécifiquement, l’hypothèse de travail de cette thèse est que les positions des spectateurs se construisent dans une instabilité entre paramètres immersifs et émersifs de l’expérience, ce qui engage une étude textuelle approfondie de la construction de la situation éthique représentée, et plus largement une réflexion sur l’utilité éthique des fictions. Codirigée par Marc Escola (Unil), spécialiste des études théâtrales, et Françoise Lavocat (Paris 3 – Sorbonne Nouvelle), spécialiste des théories de la fiction, la thèse travaille sur un corpus de spectacles (et leurs textes) joués ces dix dernières années dont l’accueil a engendré un nombre important de réactions morales, mais l’originalité de l’approche est qu’elle se penchera tout particulièrement sur des sources de réception dans lesquelles des spectateurs racontent leur expérience éthique du spectacle et construisent une évaluation morale. Pour élaborer son cadre épistémologique, le projet se déroule en collaboration avec un institut (CERC Paris 3) et des chercheurs (R. Baroni, Unil ; A. Gefen, Paris 3 ; E. Bouju, Paris 3) spécialistes de l’expérience fictionnelle ainsi qu’avec les instituts d’études théâtrales de Lausanne et de Paris 3, ce dernier accueillant la bibliothèque Gaston-Baty où se trouve une part importante du corpus de réception. En préparation de ma thèse, une des revues de théorie littéraire les plus influentes (Poétique) a d’ailleurs accepté de publier un de mes articles sur les problématiques que pose une étude des positions éthiques des récepteurs de la fiction. Le projet se veut tourné vers les humanités numériques (constitution d’une base de données gratuite), créateur d’une synergie entre chercheurs (organisation d’une journée d’études) et partisan d’une ouverture de l’université vers l’espace public (collaboration avec des théâtres de Paris et Lausanne). Les résultats de cette recherche intéresseront la communauté scientifique au sens large : théoriciens de la réception et de la fiction, philosophes travaillant sur l’éthique, spécialistes du théâtre et de l’éthique en littérature. Les travaux contemporains en témoignent : les études littéraires peuvent penser le rôle des fictions dans l’éthique du citoyen moderne. Et, en choisissant le théâtre comme corpus d’études, en cherchant à bâtir un modèle théorique impliquant les réactions éthiques face à la fiction, le présent projet de thèse entend combler un double vide de la recherche actuelle.

Statut au début
Délai administratif de soutenance de thèse 2022
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